Back to top

Santé mentale : les jeunes français en détresse

Postée le 26/03/2021

Au fur et à mesure que la pandémie mondiale continue, entraînant confinements et fermeture des écoles et universités, le moral des français baisse. Mais surtout, la santé mentale des plus jeunes décline de manière alarmante.

30% de suicides en plus chez les jeunes

Chez les jeunes de moins de 15 ans une hausse des tentatives de suicide mais aussi des troubles alimentaires a été constatée par le Pr Richard Delorme, chef de service de pédopsychiatrie à l'hôpital Robert-Debré (AP-HP) et le Pr Christèle Gras-Le Guen, présidente de la Société française de pédiatrie. Le délégué ministériel à la santé mentale, Frank Bellivier, a sonné l’alerte lors d'une table ronde organisée le 4 mars 2021 par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur les conséquences psychiques de la crise liée au Covid-19. Il a reconnu que cette situation n’avait pas été anticipée.

 

Cette tendance se confirme du côté de Santé publique France : le responsable du département Santé mentale Enguerrand du Roscoat évoque, à partir des bulletins Oscour, une augmentation des passages aux urgences pour troubles de l'humeur à l'automne et en février, ainsi qu'une hausse des gestes suicidaires. Plus de 300 élèves du primaire et du secondaire se sont suicidés entre début avril et fin novembre 2020, un bond de près de 30 % par rapport à la même période l'année précédente.

 

Les étudiants plus en danger que jamais

Pour les étudiants, population souvent fragile car ayant très peu de revenus, il est devenu difficile de se nourrir après la fermeture des restaurants universitaires. De plus l’isolement doublé de peu de visibilité sur leur avenir et leur débouchés après diplôme, font des ravages sur leur santé mentale. Selon une enquête publiée en janvier pour la Fondation FondaMental, près d’un jeune sur trois a eu des “pensées suicidaires” ces derniers mois en France.

 

Le youtubeur et journaliste Hugo Travers, sur sa chaîne “Hugo Décrypte”, a également donné l’opportunité à des étudiants de s’exprimer lors d’un live avec la ministre de l’enseignement Supérieur, et via des messages vocaux. Des messages alarmants, comme celui de Grâce, qui avoue “J’ai eu pour la première fois des pensées suicidaires”, celui de Léann qui dit “Il y a énormément d’étudiants qui abandonnent dans ma licence, et qui disparaissent. On ne sait pas où ils sont, et on ne sait pas ce qu’ils font…” ou celui d’Alexis qui explique “Je n’ai plus d’espoir. Plus d’espoir de m’en sortir, plus d’espoir de me dire qu’un jour ce sera fini…”

 

Des médecins se sont déjà exprimés auprès des députés, comme le Pr Christophe Tzourio, directeur du centre de recherche Bordeaux Population Health/Inserm et du centre de santé des étudiants à Bordeaux. Il dirige deux cohortes en ligne : I-Share, lancée en 2013, et Confins, depuis le premier confinement. Pour lui “I-Share avait déjà mis en évidence la fragilité de la population étudiante, en termes de santé mentale. Grâce à Confins, qui compare l'état de santé de 2 500 étudiants, par rapport à 1 500 autres personnes, nous observons que les premiers vivent deux fois plus mal le confinement que les non-étudiants”

 

Population fragilisée, les étudiants sont celle qui a le score de bien-être le plus bas dans l'enquête en population générale menée par le Pr Nicolas Franck, chef de pôle au Centre hospitalier Le Vinatier (Bron). L’enquête, lancée dès la deuxième semaine du premier confinement a recueilli les réponses de 19 000 personnes puis de 1 300 autres après avoir été rouverte lors du second confinement. Pour les 1 434 étudiants sondés, le score de bien-être est à 46 sur une échelle de 14 à 70, contre une moyenne habituelle de 53.

A titre de comparaison, le score des salariés était à 50, et celui des chômeurs à 49 lors du premier confinement. Il est tombé à 42 pour les étudiants lors du confinement d'automne.

Quelques solutions en déploiement

Face à cette situation très grave, les pouvoirs publics ont lancé, début février, le “chèque psy” afin que les étudiants puissent bénéficier de trois consultations gratuites chez un psychologue ou un psychiatre. Si ce chèque est certainement une porte ouverte vers l’amélioration, ceux dont la détresse est profonde ont besoin de bien plus. Des professionnels de la santé mentale et de la psychiatrie, lors de leur audition à l'Assemblée nationale début mars, ont insisté sur le besoin de mesures plus larges, comme la réouverture des facultés et le lancement des campagnes de communication ciblées.

Les services de santé destinés aux étudiants sont en effet souvent démunis face à la demande de jeunes en détresse psychique. En France, on estime qu’il y a seulement 1 psychologue pour 30 000 étudiants.

Autre initiative : plusieurs plateformes d’informations ont vu le jour comme “Écoute étudiants Île-de-France”, un site gratuit et anonyme dédié au soutien psychologique et à l’écoute, créé par la Fondation FondaMental avec le soutien de la Région Ile-de-France.

 

Claire Bléhaut

----------------------------

Sources :

Écoute étudiants Île-de-France : https://ecouteetudiants-iledefrance.fr/home

Hugo Décrypte : https://youtu.be/9XzBeUUATbE et https://youtu.be/yTocZOLjzC8

https://www.france24.com/fr/france/20210224-apr%C3%A8s-le-covid-19-le-spectre-d-une-%C3%A9pid%C3%A9mie-de-suicides-en-france

https://www.lequotidiendumedecin.fr/actus-medicales/sante-publique/accompagnement-psy-des-etudiants-le-cheque-psy-prend-forme-avec-le-lancement-dune-plateforme

Photo par dashu83 - www.freepik.com