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Des exosquelettes pour soulager le personnel soignant en réanimation

Postée le 02/09/2020

Les nombreux patients souffrant du syndrome de détresse respiratoire aiguë grave lié à la Covid-19 admis en unités de soins intensifs ont dû être placés en décubitus ventral, une position cruciale pour leur traitement. Chaque procédure nécessite qu’environ six membres du personnel médical formés au geste restent le buste penché vers l’avant pendant plusieurs minutes, ce qui entraîne une charge physique au niveau lombaire et peut occasionner des blessures.

Une équipe pluridisciplinaire, composée de médecins, chercheurs en robotique et ergonomes du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy, de l’université de Lorraine, de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique, du Centre national de la recherche scientifique et de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), a collaboré pour tenter de soulager les contraintes du personnel médical travaillant avec ces patients. L’idée est de mettre au point un exo-squelette afin d’aider physiquement les soignants impliqués dans cette manœuvre compliquée. Les résultats de ce projet pilote baptisé ExoTurn viennent d’être publiés dans la revue Annals of Physical and Rehabilitation Medicine [1].

Des équipes spécifiques de retournement en position ventrale ont été déployées au CHRU de Nancy du 23 mars au 24 avril 2020, dans l’unité de soins intensifs étendue (de 22 à 46 lits). Pendant cette période, 75 volontaires se sont relayés pour disposer chaque jour d’une à trois équipes de cinq personnes et ont effectué en moyenne entre huit et quinze placements par jour, ce qui correspond à un poids total manipulé supérieur à 30 tonnes. Une analysecinématique effectuée par le Laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications montre que le personnel médical peut passer environ 40 % du temps avec le buste penché vers l’avant de plus de 20 degrés lorsqu’il est placé à côté du patient, et maintenir une posture statique avec une importante flexion du tronc pendant plusieurs minutes pour sécuriser la tête du malade et éviter l’extubation.

Selon les chercheurs de l’INRS, il s’agit d’une situation typique où les exo-squelettes de soutien dorsal, généralement déployés dans l’industrie, peuvent être envisagés afin d’améliorer les conditions de travail. Pourtant, les exos-quelettes n’avaient jamais été utilisés dans les unités de soins intensifs.

L’équipe a d’abord évalué différents modèles de soutien dorsal en simulation sur des soignants qui effectuaient la manœuvre sur un mannequin, avant de déployer l’exo squelette sélectionné sur deux volontaires effectuant le décubitus ventral en situation réelle dans une unité de soins intensifs. Ce dispositif accumule de l’énergie à travers un système de ressorts au niveau des hanches, ce qui permet de répartir la force exercée sur le dos vers les cuisses et le sternum lorsqu’on se penche en avant. L’exo squelette a ensuite été testé dans une salle de soins intensifs du centre de simulation de l’hôpital virtuel de Lorraine avec un simulateur-patient reproduisant les conditions compliquées des malades Covid-19 en réanimation. Les premiers résultats montrent que le personnel médical utilisant cet exo-squelette pendant les manœuvres de décubitus ventral a perçu un soulagement physique dans le bas du dos.

 

Catherine Boisaubert

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Référence

[1] Settembre N, Maurice P, Paysant J, et al.The use of exoskeletons to help with prone positioning in the intensive care unit during COVID-19. Annals of Physical and Rehabilitation Medicine 2020. [In Press] https://www.em-premium.com/article/1371618/.