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Événements indésirables graves : une sous-déclaration encore importante

Postée le 18/07/2020

Le monde de la santé est particulièrement concerné par l’existence de risques. Un événement indésirable peut survenir à tout moment lors d’une prise en charge et, selon les conséquences encourues pour le patient, peut être qualifié d’événement indésirable grave associé aux soins (EIGS). C’est le cas lors d’un déficit fonctionnel perma-nent, de la mise en jeu du pronostic vital ou du décès du patient. Depuis 2017, la déclaration par les professionnels de santé de ces événements graves est obligatoire auprès des agences régionales de santé (ARS). La Haute Autorité de santé (HAS) est, elle, destinataire des déclarations complètes anonymisées des EIGS et chargée d’en publier un bilan national annuel accompa-gné de préconisations pour améliorer la sécurité des patients.

Son deuxième bilan rapporte 820 déclarations d’EIGS pour l’année 2018 sur 3 536 déclarations auprès des ARS [1]. La plupart émanent de professionnels exerçant dans un établissement de santé (82 %), dans le secteur médico-social (14 %) et en ville (4 %). Parmi les conséquences de ces EIGS, le décès du patient est la plus déclarée (50 %), suivie par la mise en jeu du pronostic vital (33 %) et par un probable déficit fonctionnel permanent (17 %). L’analyse de ces déclarations permet de confirmer que les périodes vulnérables (nuits, week-ends, jours fériés) sont fréquemment celles où survient un EIGS (39 % des déclarations) et que la majorité d’entre elles (55 %) sont considérées comme évitables.

La HAS a développé un outil d’analyse textuelle et de traitement statistique et l’a combiné au travail réalisé par des experts pour mieux comprendre les informations contenues dans les déclarations. Cela a permis d’identifier 20 principaux risques – dont les dix premiers sont matérialisés dans le graphique ci-dessus –, au premier rang desquels figurent des suicides de patients, des chutes et des erreurs médicamenteuses. Ces trois problématiques ont été inscrites au programme de travail de la HAS à l’occasion de la publication du premier rapport, et devraient aboutir à de premières préconisations dans le courant de cette année. Parmi les autres risques identifiés, la HAS, relève des défauts de prise en charge (retard de prise en charge, défaut de surveillance), des problèmes liés à des contentions physiques passives mal maîtrisées, des gestes traumatiques ou aux inter-ventions des Samu/Smur. Cette année, les activités des Samu et des Smur ont été ajoutées au programme des travaux.

Quatre axes prioritaires ont été distingués pour améliorer la sécurité du patient : la réalisation d’une étude de risques sur les EIGS liés à l’utilisation des systèmes d’information (sujet déjà repéré par le biais du dispositif d’accréditation des médecins et des équipes médicales), le renforcement de l’analyse des EIGS par les professionnels de santé face à un décès du patient inexpliqué ; la mise en œuvre des bonnes pratiques concernant la contention physique de la personne âgée d’une part, et l’isolement et la contention des patients dans le champs psychiatrique d’autre part.

La HAS souligne deux freins à un fonctionnement optimal du dispositif : une sous-déclaration encore importante des EIGS, qui impacte directement le contenu de ses travaux, et une non-maturité du dispositif, caractérisée par des déclarations de qualité inégale et des analyses parfois non abouties. Consciente de ces limites, la HAS propose d’optimiser le processus informatique de traitement des déclarations d’EIGS pour un meilleur suivi avec les ARS. Elle souhaite également renforcer l’information autour du dispositif et la culture déclarative auprès d’un maximum d’acteurs des secteurs sanitaires et médico-sociaux et développer un guide pédagogique sur l’analyse approfondie des EIGS avant transmission à la HAS. Enfin, la HAS préconise de réaliser dans les organisations sanitaires et médico-sociales un audit du dispositif de déclarations des événements indésirables associés aux soins (dont les EIGS) et la mise en œuvre des actions d’amélioration correspondantes.

Catherine Boisaubert

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Référence

[1] www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2019-12/rapport_annuel_eigs...